Femme, maman et menuisière !

25/05/2022 4 min

© Atelier Quinquete


À l’occasion de la fête des Mères, Amélie Petitjean-Martigny, maman et passionnée par son métier de menuisière, nous raconte son parcours inspirant. De cheffe d’entreprise dans la communication jusqu’à la création de son Atelier Quinquete, dans la région de Reims, elle partage les clichés sexistes auxquels elle peut faire face, dans une profession souvent considérée comme exclusivement masculine.

« Lorsqu’on devient maman, les priorités changent ». Après avoir dirigé sa propre agence de communication pendant onze ans, Amélie décide de changer de voie en 2016, à la naissance de son fils. D’abord tentée de rester dans son secteur, mais en tant que salariée, elle vend son entreprise. Puis, en 2018, c’est le déclic. La jeune maman a besoin de concret et de créer des produits utiles. Finalement, elle se lance dans le design puis dans la fabrication de lampes en bois. Très vite, on lui réclame des planches de cuisine, des petits meubles puis des plus gros. Aujourd’hui, Amélie est menuisière et fière de l’être… mais cela n’a pas toujours été le cas !


Une vocation familiale

Pourquoi avoir choisi une reconversion en menuiserie ? Le grand-père d’Amélie était lui-même menuisier et chef d’une entreprise de menuiserie. C’est donc tout naturellement que sa petite-fille a toujours eu un attrait pour la noble matière du bois. « Pourtant, même si je m’y intéressais plus jeune, je me suis toujours dit que c’était un métier d’homme, qui conviendrait plus à mon frère ou mes cousins, les garçons de la famille », explique-t-elle. Heureuse de se lancer dans une activité qui fait écho à son histoire familiale, la consécration a surtout lieu lorsque son grand-père lui commande une pièce faite de ses propres mains. Une reconnaissance très symbolique pour la jeune menuisière qui a eu du « mal à trouver sa place » dans ce milieu masculin.


Se libérer des clichés

« Le nom de menuisière était une appellation avec laquelle j’avais du mal au début ». Ne se sentant pas légitime dans ce rôle, Amélie restait évasive dans ses publications Instagram et n’employait jamais ce mot au féminin. « Je laissais planer le doute pour que les gens ne sachent pas que je suis une femme. J’avais peur du regard des autres, ou que l’on m’accorde moins de crédit parce que je suis une menuisière et pas un menuisier », confie-t-elle. Faisant souvent face à des réflexions sexistes ou maladroites comme le tristement populaire, « c’est du beau boulot pour une femme ! », Amélie a dû se blinder au fil du temps.

Quand on est menuisière, ou qu’on exerce un métier représenté comme une profession d’homme, cela a forcément une répercussion sur la manière d’élever son enfant. « Mon fils sait ce que fait sa maman et en est fier. Il n’a aucun problème avec ça ! », indique Amélie. Jamais étonné de voir sa maman avec un marteau ou une visseuse, le petit Charly âgé de six ans est ouvert d’esprit. Bien sûr, comme toutes les mamans qui travaillent, Amélie regrette de ne pas avoir plus de temps avec son fils et explique qu’il est parfois compliqué de trouver un équilibre entre l’organisation professionnelle et la vie de famille. D’après elle, être une maman bricoleuse, c’est devoir trouver deux fois plus de solutions à tout. « Je cherche constamment des astuces pour les projets de mes clients et c’est également la même chose dans ma vie personnelle. Je redouble d’ingéniosité pour ne jamais laisser mon fils ou ma famille de côté ». Pour cela, Charly vient la voir de temps en temps à l’atelier. « Il adore voir ce que je fais et me demande toujours comment il peut m’aider ! », explique la menuisière.


Féminité et BTP

Totalement à l’aise dans ses baskets, Amélie s’épanouit dans son métier comme de plus en plus de femmes dans le BTP. Elle s’est notamment rapprochée ces dernières années du collectif, « Les filles du BTP » qui regroupe des femmes carreleuses, peintres, menuisières, plombières, ébénistes, etc.  Une source d’inspiration et un soutien au quotidien.  Lorsqu’on lui demande s’il est difficile de concilier la féminité avec un tel métier, Amélie répond que « ce n’est pas faux ». Il faut dire qu’au début de sa reconversion, la menuisière avait parfois honte de ses tenues, qu’elle jugeait trop masculines. « Je changeais systématiquement de vêtements lorsque j’allais chercher mon fils à l’école. Les tenues ressemblaient à des sacs à patates, car n’étaient pas ajustées pour les femmes ». Aujourd’hui, elle explique que les marques ont fait des efforts sur les coupes et les modèles et qu’il est possible « d’être féminine tout en étant sur des chantiers ! ». Si les marques s’adaptent, c’est aussi parce que c’est un fait : le secteur du BTP se féminise progressivement. « Il y a de plus en plus de bienveillance autour des femmes dans ces métiers et même une forme d’admiration de certains parce que oui, je suis une femme et je produis des ouvrages de menuiserie qui en impressionnent plus d’un ! ».