Ils autoconstruisent une maison bioclimatique. Étape 5 : fondations et dalle, les dilemmes du projet

08/11/2022 7 min


Sur Recto & Verso, suivez l’avancée du chantier de l’autoconstruction de la maison bioclimatique de Maria et Robin.

Si Maria et Robin avaient des idées plutôt arrêtées sur une étape du chantier, c’était bien sur celle des fondations et de la dalle. La solution était claire : des fondations en micropieux métalliques, sur lesquels serait posée une dalle en bois. Mais les événements et de nouvelles réflexions en ont décidé autrement. Retour sur cette délicate phase du chantier.


Des études du sol déterminantes

Savez-vous ce qu’est une étude G1 ? Il s’agit d’une étude du sol, et plus précisément de l’étude géotechnique préalable. Depuis le 1er janvier 2020, ce document doit être fourni par le propriétaire lors de toute vente d’un terrain constructible, dès lors que ce dernier se trouve en zone d’aléa moyen ou fort au phénomène de retrait-gonflement des argiles (loi ELAN).

Concerné par ce dispositif, le terrain de Maria et Robin avait déjà fait l’objet de trois prélèvements. Les résultats de l’analyse n’avaient pas donné lieu à un avis « défavorable à toute construction ». En revanche, hormis la présence de terre et de sable, était mentionnée celle de « lentilles d’argile ». Et l’argile dans le sol, ce n’est jamais bon pour une construction, puisqu’elle se gonfle et se rétracte en fonction du degré d’humidité et de la température, avec toutes les contraintes que cela implique sur la construction.

Les préconisations de cette première étude portaient sur la mise en place de fondations profondes et sur l’obligation d’y associer un vide sanitaire. Or le choix d’un vide sanitaire n’est pas compatible avec la solution envisagée par Maria et Robin. Ces derniers se décident alors à lancer une deuxième étude de sol, la G2, qui permet théoriquement de focaliser les prélèvements sur la partie du terrain qui sera construite. Cette nouvelle analyse est également vue comme un moyen de conforter les choix de construction vis-à-vis des assurances, lesquelles peuvent se retourner contre le propriétaire si ce dernier ne suit pas les préconisations des études. De plus, les avis et conseils des personnes étant déjà passées par cette étape vont dans ce sens.

L’étude G2 est donc commandée. Robin trace sur le sol les contours de la future dalle, afin de circonscrire l’aire des prélèvements. Malgré cette précaution et les indications données à l’entreprise chargée de réaliser les carottages, ces derniers ne sont pas faits aux endroits exacts. Robin, ayant constaté ces écarts, souligne l’importance d’être physiquement présent sur le chantier « notamment au moment des phases délicates comme celle-ci ».

Néanmoins, cette deuxième analyse conclut à une nature du sol similaire à celle qui avait déjà été identifiée, et a l’avantage de lever l’obligation d’installer un vide sanitaire. Alors, micropieux et dalle en bois ? Un match s’engage.

À savoir :
Une étude G1 coûte entre 500 et 2500 euros, une étude G2 coûte entre 2000 et 15 000 euros, en fonction de la nature du projet.


Le match béton vs micropieux + dalle bois 

Robin était le plus ardent défenseur de la solution retenue initialement : « Si la solution de la dalle en bois sur micropieux était intéressante pour des constructions sur des terrains en pente, ce qui n’est pas le cas ici chez nous, elle offre l’avantage non négligeable d’être propre écologiquement et d’être presque réversible si un jour la maison devait être démontée. On reviendrait alors à un terrain vierge de toute construction. »

Maria, pour sa part, a pris un peu de recul sur ce choix. Elle soulève deux points cruciaux selon elle. En premier lieu, la future maison étant construite à 100 % en bois, elle n’offre pas d’inertie thermique. Maria l’explique ainsi : « Nous n’avions prévu aucun matériau suffisamment dense et peu isolant pour pouvoir stocker et restituer le froid ou la chaleur, une fois entrés dans la maison, petit à petit. C’est le principe de l’inertie. » Robin acquiesce. Maria en profite pour préciser qu’en bioclimatisme, « un bon isolant est un mauvais matériel pour provoquer l’inertie ». En second lieu, Maria craignait un « effet cabane » de la dalle en bois, lié au bruit que chaque pas ferait en résonnant dans le vide. Robin n’acquiesce pas ce point.

Finalement, c’est sur le terrain de la performance énergétique que Maria l’emporte. Le couple y perd le caractère « propre » de cette phase, mais y gagne largement en inertie thermique du sol. Ce sera donc une dalle en béton, posée sur des fondations, sans vide sanitaire. Ce dernier constituerait en effet un frein supplémentaire à la restitution de la chaleur ou du froid emmagasiné dans le sol. Maria concède toutefois qu’il est « plus facile d’installer les gaines et les réseaux quand il y a un vide sanitaire plutôt que dans la terre. » C’est pourquoi Robin prévoit d’installer des tampons de visite réguliers, de sorte qu’aucune canalisation ne sera inaccessible d’un bout à l’autre de la maison. De plus, tous les points d’eau ont été prévus à un mètre de la périphérie de la maison.

À savoir :
Une autre option réside dans le choix d’une dalle constituée de chaux mélangée à du chanvre, mais peu d’artisans proposent cette prestation, et son coût est élevé.


Le choix du maçon : une étape décisive

Pour Maria et Robin, une chose est sûre, « pas question de réaliser nous-mêmes les fondations et la dalle en béton ». Il leur faut alors choisir un maçon. Six professionnels ont été consultés, proposant des prestations aux montants compris entre 25 000 à 40 000 euros.

Le choix s’est avéré délicat, mais s’est finalement porté sur un maçon expérimenté, recommandé par des membres de la famille, pour un coût de 35 000 euros. Avec le recul, le couple précise qu’il aurait été probablement plus judicieux de s’engager avec un maçon non ancré dans des habitudes professionnelles quelque peu figées et plus ouvert à d’autres techniques et méthodes de construction.

En l’occurrence, celui qui a été choisi, fervent défenseur du vide sanitaire, n’a pas réellement lu le cahier des charges, et n’a pas respecté une indication importante dans le cadre d’une construction bois : le pourtour de la dalle, sur lequel viennent se poser les murs, devait être strictement au même niveau partout. Or des décalages de 2 centimètres ont été constatés à certains endroits, ce qui nécessitera de procéder à des calages lors de la pose des murs en bois et des lambourdes qui accueillent le parquet… des « rattrapages » très chronophages et impliquant de nouveaux frais.

À savoir :
Dans le cadre d’une construction en bois, le niveau de la dalle en béton doit être parfaitement égal en tout point, et particulièrement sur sa périphérie, qui accueille les murs.


Un autre dilemme : quel isolant sous la dalle ?

L’idée de Maria et Robin est d’intégrer une couche isolante de 10 centimètres entre les fondations et la dalle ainsi que sous les murs, sur toute la périphérie de la maison, afin d’éviter les ponts thermiques et de réaliser d’importantes économies d’énergie en chauffage. Cette pratique n’est pas commune. « Ne pas isoler était une autre option, précise Robin, la dalle et la terre constituant elles-mêmes une masse thermique »

Le choix du matériau isolant s’est avéré sensible, lui aussi. « L’idéal aurait été d’utiliser du liège expansé, “propre” et hydrofuge, mais le coût était trop élevé », indique Robin. Et dans tous les cas, « ce matériau n’était pas suffisamment robuste en compression pour soutenir le poids des murs », ajoute-t-il.

L’option de la fibre végétale n’était pas envisageable non plus, car non adaptée à une isolation de dalle, au regard de l’humidité qui pourrait s’y développer, dans un endroit non aéré, et de sa capacité à supporter le poids de la construction.

Si le polystyrène n’était pas le matériau souhaité pour isoler le sol, Maria et Robin se consolent en signalant qu’ils ont récupéré des panneaux en très bon état sur un autre chantier, certes complétés de quelques panneaux neufs.

Retrouvez Maria & Robin prochainement sur Recto & Verso sur le sujet de la structure bois.